Kezako?
SCAPE est un jeu de cartes à identité caché, de manipulation et d’ambiance créé par Francisco « PAK » Gallego Arredondo (Myths at War) et illustré par Siscu Bellido. Sorti en 2015, le jeu est édité par GDM Games et est conçu pour 3 à 9 joueurs (extensible à 14 joueurs avec un jeu supplémentaire) dès 8 ans pour une durée de jeu de 20 minutes.
Le pitch
En 1943, durant la Seconde Guerre mondiale, des soldats (notamment britanniques et américains), qui ont déjà essayé de s’évader, se retrouvent emprisonnés dans un camp de prisonniers de la Luftwaffe (Stalag Luft III). Ils profitent de leurs conditions de vie relativement confortables pour organiser une fuite collective (prévue pour 250 personnes) via un tunnel qu’ils devront creuser aux yeux et à la barbe de leurs geôliers…
Ce synopsis vous évoque quelque chose? Oui? Non? Voyez plutôt….
C’est exacte! SCAPE s’inspire bien du film mythique de John Sturges – La Grande Évasion. D’ailleurs pour l’anecdote, les faits décrits dans le livre dont le film a été tiré sont intégralement vrais. Le récit se base sur l’évasion en masse des prisonniers du Stalag Luft III situé à Sagan (Pas Francoise donc…) dans la province de Basse-Silésie (maintenant Żagań, en Pologne).
Dans SCAPE, les joueurs incarnent pour le coup les prisonniers du Stalag qui devront réussir à creuser un tunnel pour s’évader sans être découvert… Deux factions de prisonniers sont représentées dans le jeu: l’US Air Force (USAF) et la Royal Air Force (RAF). Seule une des ces factions pourra sortir vainqueur (à moins d’une égalité à la fin de jeu).
Mais ce ne sera pas si simple, car la faction ennemie SS surveille le Stalag et tentera se s’infiltrer pour faire capoter l’évasion dans la mesure ou aucun des joueurs ne connait la faction des autres joueurs…
Le matériel
Le jeu est composé de 53 cartes dont 35 cartes « Tunnel », 9 cartes personnages, 3 aides de jeu et 6 cartes de règles de jeu (dispatchés par groupes de 2 pour le français, l’anglais et l’espagnol). Le tout est rangé dans une micro boite très solide et de bonne facture permettant d’emporter le jeu n’importe où…
Thème du jeu et illustrations
La thématique du jeu est évidemment la seconde guerre mondiale et plus précisément l’ambiance filmographique autour du Stalag III de La Grande Evasion. A l’illustration, on retrouve Siscu Bellado, un artiste espagnol spécialisé dans les illustrations de comics basé à Barcelone. Le style de SCAPE est relativement agréable et le thème général bien calqué puisque Siscu s’est délibérément inspiré du film pour illustrer les cartes Tunnel. Personnellement, je ne suis pas très adepte du style que je trouve un peu froid – mais c’est évidemment une question de goût et de couleur qui ne se discute pas. En revanche, je trouve dommage que le nombre d’illustrations différentes ait été restreinte – peut-être par soucis d’économie en terme de budget… A commencer par les personnages des officiers de l’US Air Force (USAF), de la Royal Air Force (RAF) et SS (Schutzstaffel). On dénombre 9 cartes de personnage, mais seulement 3 illustrations pour les représenter. Pourquoi identiques? De même que les 35 cartes Tunnel se partagent les mêmes 6 illustrations. Ce qui changera finalement d’une carte illustrée pareillement à une autre, ce sont les sigles affichés (USAF, RAF et SS) et les pictogrammes des actions possibles avec ces mêmes cartes. Dommage…
En ce qui concerne en revanche les pictogrammes et les règles du jeu, tout est très clair très rapidement et ne nécessite aucune connaissance en araméens ou autre langage bien funky – ce qui n’est de loin pas toujours le cas…
Comment qu’on joue dit?
Les règles sont à vrai dire très simples et tiennent sur une carte à jouer recto-verso.
On commencera par mélanger les cartes Tunnel, puis on en distribuera 4 cartes à chaque joueur indépendamment du nombre de joueurs. Puis, il s’agira de mélanger les cartes Personnage pour ensuite laisser chaque joueur en tirer une au hasard. Notez que les cartes Personnage reflètent l’identité du joueur en jeu – identité qui devra rester secrète jusqu’à la fin de la partie (si possible)…
Le nombre de cartes Personnage à mettre en jeu et leur type sera directement lié au nombre total de joueurs. Au total, on dénombre 4 officiers de l’USAF, 4 officiers de la RAF et un officier SS.
Ainsi, pour 3 joueurs, il y aura un officier de chaque nation. Pour 5 joueurs, on aura deux officiers (USAF/RAF) pour un officier SS. Pour 7 joueurs, il faudra compter 3 officiers (USAF/RAF) pour un officier SS. La donne change pour le coup lorsque le nombre de joueur est pair puisque on retirera systématiquement l’officier SS du jeu, résultant en un affrontement USAF/RAF.
Il est toutefois possible de jouer à plus dans la mesure ou il suffit d’ajouter le contenu d’une seconde boite pour pouvoir doubler la capacité de joueurs. Les règles affichent un exemple jusqu’à 14 joueurs. Dans le cadre de deux boites et pour un nombre de joueurs impair, on gardera toutefois une carte d’officier SS en jeu (2 si pair). Ceci étant, je ne vois pas trop de limite à ce système. On peut tout à fait imaginer en fin de compte faire une partie à 64, si tant est que l’on soit en possession d’assez de boites du jeu… Mais pour simplifier, nous nous bornerons aux variations pouvant être jouées avec un seul exemplaire du jeu.
Une fois que les identités ont été distribuées, il s’agira de définir le premier joueur.
Chaque tour de jeu est composé de 2 actions.
- Jouer une carte de sa main
- Piocher une carte de talon
Il y a 2 façons de jouer une carte de sa main.
- Face visible
- Face cachée
…Face cachée.
Chaque carte possède au dos une des lettres formant le mot « SCAPE ». Jouer une carte Face cachée signifie poser une carte au centre de la table pour former le mot SCAPE. Si une carte avec la même lettre est déjà posée sur la table, votre exemplaire viendra simplement se poser par dessus. Ainsi, pour toutes les cartes jouées Face cachées en fin de jeu, on aura 5 piles de cartes des lettres S, C, A ,P et E.
A quel fin me direz-vous? Et pourquoi former le mot SCAPE?
Patience! On vous explique tout un peu plus bas…
…Face visible.
Jouer une carte face visible signifie appliquer l’effet indiqué sur la carte. Il existe 5 effets différents.
- Chaque joueur donne une de ses cartes au joueur de droite ou de gauche
- Chaque joueur défausse une carte de son choix
- Défausser une carte de son choix posée face cachée sur la table
- Découvrir l’identité d’un joueur
- Révéler 2 cartes Tunnel en jeu.
Les actions 1 à 3 sont très logique et ne nécessite aucune précision. L’action n°4 donne la possibilité à un joueur de prendre la carte Identité d’un autre joueur et de la découvrir avant de la reposer face cachée. L’action n°5 permet au joueur de retourner 2 cartes posées face cachée sur la table; il est évidemment question des premières cartes de chaque pile de lettres formant le mot SCAPE.
On poursuivra de la sorte jusqu’à ce que tous les joueurs aient joués toutes leurs cartes…
Fin de partie et décompte des points
Plus personne n’a de cartes en main – la partie se termine. Il va s’agir de déterminer à présent quelle faction a remporté la partie.
Est-ce l’USAF qui aura réussi à s’évader du Stalag ou est-ce la RAF?
Ou pire, est-ce que la faction SS aura réussi à compromettre votre évasion?
Les conditions de victoires sont les suivantes:
- Si le mot SCAPE n’a pas été complètement écrit, la faction SS gagne la partie
- S’il y a au moins une carte avec le symbole SS sur le dessus d’une des piles, la faction SS gagne la partie
- Sinon, c’est la faction avec le plus grand nombre de symbole de sa faction représenté sur le sommet des piles qui gagne la partie. En cas d’égalité, USAF et RAF réussissent tout deux à s’évader.
Une vidéo plus que des mots
Zee Garcia du canal Youtube « The Dice Tower » – au sein duquel oeuvre d’ailleurs Tom Vasel, propose une review de SCAPE très intéressante que je vous encourage à visionner si vous êtes intéressé…
[©2015, The Dice Tower]
Verdict votre honneur?
Parmi les types de jeu que j’apprécie, il y a un genre que j’affectionne particulièrement: les jeux à identités cachés. Ce type de jeu est assez répandu aujourd’hui qui plus est développé pour toutes sortes d’univers. Des jeux tels que Les Loup-Garous de Thiercelieux, Ultimate Wherewolf, Resistance, 10′ to kill, Avalon, Nosferatu, Love Letter, Room 25, Mascarade, Complots, Shadow Hunters, Battlestar Galactica ne sont que quelques titres d’une liste non-exhaustive ! On pourrait cependant scinder cette liste en deux groupes. Un premier groupe serait composé des jeux étant plus axé sur la manipulation et le bluff verbale de par l’échange entre les joueurs tel que les Loup-Garous alors qu’un second groupe ferait la part belle à la dissimulation identitaire de par ses actions au sein du jeu. SCAPE fait partie de ce second groupe.Autant le dire tout de suite et répondre à la question principale: oui – j’ai beaucoup apprécié jouer à SCAPE. A présent, concentrons-nous sur le pourquoi…
SCAPE est un petit jeu très malin qui ne paye absolument pas de mine. Petit de part sa taille et de par son contenu minimaliste, il est assez aisé de supputer que les micro-règles associées ne vont conduire les joueurs qu’à une seule chose: l’ennui. Hors, c’est totalement faux! On prend rapidement la mesure lorsque l’on constate que tout au long du jeu, on va être confronté au même simple dilemme et que faire pencher la balance du mauvais côté pourrait générer de sérieuses complications.
Jouer une carte face cachée ou face visible? Vous allez me dire que dans le genre dilemme, on a déjà rencontré questionnement plus balèze… Ne serait-ce qu’avec la couleur de nos chaussettes tous les matins… Certes… Et pourtant, c’est justement toute la force ludique de SCAPE qui va plonger le joueur dans une série de choix limités mais pourtant déterminant. Associée à l’identité secrète, les joueurs seront confrontés à la même question tout du long de la partie: « Tente-il de me faire croire qu’il est… Ou est-il? ». Les joueurs s’avèrent rapidement captivés, tentant de démasquer leurs adversaire tout en essayant de tirer leur épingle du jeu… Le facteur de rejouabilité est d’autant plus grand que le jeu est très simple à mettre en place et qu’il faut à tout casser 5 bonnes minutes pour expliquer et comprendre les règles.
On pourra également saluer le fait que GDM et plus précisément Pak Gallego affiche la volonté manifeste de pouvoir proposer le jeu à l’international, faisant l’effort d’inclure les règles et les aides de jeu en 3 langues et en plusieurs exemplaires.
Cependant, tout n’est pas rose; à commencer par la traduction française qui affiche plusieurs fautes d’orthographe notamment sur les aides de jeu et même une tournure de phrase plutôt amusante sur la boite du jeu. Ainsi, la phrase anglaise « Scape is a hidden role game based on… » deviendra en français « Scape c’est un jeu d’identités occultes basé sur… ». Occulte? Cthulhu est-il dans la place?
Alors certes, tout ça n’est pas franchement top-moumoute, mais certainement pas rédhibitoire. J’ai également noté que les indications quant au jeu n’était pas totalement correctes sur la boite. Comme vous pouvez le constater ci-dessus, il est notamment indiqué qu’une partie durera 20 minutes – ce qui est vrai. Cependant, en terme de nombre de joueurs, il est mentionné que SCAPE se joue de 1 à 9 joueurs, extensible à 18; ce qui ne correspond pas avec les explications des règles du jeu qui elle, précisent que le jeu se joue de 3 à 8 joueurs, et qu’un second exemplaire du jeu serait nécessaire pour pouvoir jouer à plus. J’ajoute que je ne vois pas trop comment le jeu pourrait être jouable à deux ou en solo… Là encore, rien de bien grave dans la mesure ou le prix du jeu tourne autour de 9-10€; acquérir un second voire un troisième exemplaire semble pour le coup à la portée d’une majorité de bourses passionnées de jeux… On pourra encore pinailler sur l’inversion du (8+) pour l’âge limite en (+8): inversion sans dommages qui pourrait tout à fait être simplement le fait de raisons linguistiques. En revanche, je ne suis pas certain que le sujet ou le concept intéresse déjà un enfant de 8 ans, pour l’avoir notamment testé avec mon aîné…
J’ai pu essayer le jeu avec un nombre de joueurs pairs et impairs; à 3, 4 et 5 joueurs pour être exacte. Selon moi, enlever la faction SS du jeu réduit considérablement l’intérêt de ce dernier. Je ne suis donc pas très enthousiaste avec ce mode. A 3 joueurs, la faction ennemie est trop rapidement identifiée biaisant sans équivoques les actions des autres joueurs. En revanche à 5 joueurs, la partie devient tout de suite beaucoup plus palpitante puisque les variables inconnues sont beaucoup plus nombreuses… J’imagine donc aisément ce que peut devenir une partie à 7 joueurs…
Bref. SCAPE est un petit jeu très sympa qui n’est certes pas parfait mais qui a le mérite de proposer une expérience ludique amusante et séduisante avec un minimum de matériel et de choix. Facile à transporter, plus qu’abordable, simple à expliquer et aisé à comprendre, SCAPE permettra aux joueurs d’aligner plusieurs parties sans avoir un sentiment de redondance. Le but du jeu est de s’évader et c’est exactement ce que le jeu réussi à faire avec ses joueurs…
Bien hecho amigo!
SCAPE en picto…
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